SONYA ISUPOVA (UA, 1994)
Période de résidence : juillet 2024
À La Becque, je me suis concentrée sur la signification de vivre au bord de l’eau. Par le biais de la fiction spéculative, j’ai relié mon séjour sur les rives du lac Léman à l’expérience de la vie à côté du réservoir de Kakhovska dans le sud de l’Ukraine, en particulier en amont de sa destruction.
Durant ma résidence, j’ai développé un rituel pour m’aider à incarner cette idée. Chaque jour, je me suis réveillée et j’ai regardé la mer artificielle, en essayant de m’y imaginer. J’ai nagé tous les jours, curieuse d’utiliser tout son potentiel. Lorsque j’arrivais au milieu de la mer, j’imaginais des dizaines de colonies enterrées sous moi. Je voyais l’eau se retirer, non pas progressivement, mais en un instant, me laissant seule dans son sillage. Puis, j’observais une forêt qui commençait à pousser à sa place.
Dans ces moments de tension où j’attendais que l’eau disparaisse, j’ai imprimé, à l’aide d’une machine à dessiner que j’ai moi-même fabriquée, une carte du paysage inondé un jour après la destruction du barrage, le 7 juin 2023. — Sonya Isupova
Diplômée de l’Académie d’art d’Estonie et de la HEAD – Genève, Sonya Isupova est une artiste visuelle et designer ukrainienne basée à Genève, lauréate du Prix Jeunes Artistes Nestlé 2023 et finaliste du prix Art Humanité de la Croix-Rouge en 2023. Dans son travail, Sonya Isupova explore les thèmes du post-colonialisme, de la territorialité et de la dichotomie inhérente à l’établissement de cartes. En mélangeant des recherches liées à l’art et au design, ses projets récents prennent la forme de machines collaboratives centrées sur les processus de cartographie et visent notamment à détecter les changements dans les paysages de son pays natal en temps de guerre. À travers sa pratique, elle explore la relation complexe entre humains et machines, les infrastructures de télédétection et leurs limites inhérentes.
Sonya Isupova, La Becque, photo Matthieu Croizier et Aurélien Haslebacher